Depuis quelques temps, j’ai comme le sentiment qu’il m’arrive plus d’évènements extraordinaires en l’espace de quelques jours que sur toutes les années précédentes. Ce qui n’est pas forcément une bonne chose, parce qu’à force je vais finir par ne plus pouvoir être surpris par quoi que ce soit…
Bon, tout ça pour dire qu’il nous en est encore arrivé une bonne. Ca faisait un peu plus de deux jours qu’on avait quitté la planète mécanique du vieux Rosen, et on était environ à mi-chemin des coordonnées qu’il nous avait filé. Les autres passaient surtout leur temps à bosser sur la puce bizarroïde récupérée dans le crâne du fœtus, mais j’avoue que je me suis pas trop penché sur tout ça.
D’abord parce que de toute façon je comprend rien à leurs histoires de technologie de pointe… et ensuite parce que la vue d’un type écorché vive trainant dans le labo me coupe l’appétit. Hal / Champollion (Champ-hal ?) a apparemment conclu de tout ça que ça servait à une ‘’mise en réseau neurale’’ et qu’il y avait aussi une ‘’sécurité de mise en veille’’.
Bref. Tout se passait donc relativement bien, quand le vaisseau s’est brusquement arrêté en plein voyage FTL au beau milieu de nulle part. Par simple précaution, je suis directement allé m’installer aux canons pendant que les autres cherchaient un peu partout ce qui avait bien pu nous stopper comme ça.
Au départ, on n’a trouvé absolument aucun indice. Le coin semblait complètement désert. Sauf qu’il est passé du statut de ‘’désert’’ à celui de ‘’oh merde !’’ en quelques secondes à peine. Plusieurs vaisseaux sont sortis littéralement de nulle part pour nous encercler. Pas des très gros, mais du genre bien armé.
Le point positif, c’est qu’ils n’ont pas ouvert le feu tout de suite. A la place, on a reçu une demande de communication. Comme je me retrouve à être le seul du Pèlerin à avoir figure humaine (mais vraiment, en plus !), c’est bien évidemment moi qui répond.
A l’autre bout de la ligne, on a la surprise de découvrir… des types d’Hanzottori. Et merde. Première fois que j’en rencontre en vrai, mais j’ai entendu assez d’histoires sur eux pour savoir que s’ils voulaient nous tuer, on était déjà morts.
Après pas mal de discussions, les mercenaires nous expliquent qu’ils sont là directement au nom du Bakufu et veulent nous voir en personne à leur bord. Vu que c’est le genre d’invitations qu’on ne refuse pas, on s’équipe et on y va…
Achab, Garfield et moi-même nous retrouvons donc à l’intérieur du navire japonais, dont l’intérieur est… surprenant. Du genre bucolique. M’attendais pas à ça. Cela dit, au moins ce sont des vrais murs qui ne sont pas vivants. Le capitaine du coin nous attend dans… euh… un coin. Le genre sérieux et poli. Il nous offre à boire avec tout un tas de gestes précis qui me donnent l’impression désagréable de ne pas tout être à ma place.
Au cours de nouvelles discussions, il finit par nous expliquer que le Bakufu a été payé par un groupe mystérieux appelé ‘’l’Unité’’ pour nous éliminer, mais qu’ils ont refusé cette mission tant qu’ils n’auraient pas davantage d’informations sur nous.
Je suis en train de me demander en quoi tout ça justifiait une information à leur bord (et apparemment, au regard suspicieux d’Achab, je ne suis pas le seul) quand soudainement j’ai la tête qui tourne et je tombe dans les vapes. J’ai juste le temps de voir le capitaine pointer une sorte de pistolet à seringues en direction de Garfield, qui a surement mieux encaissé le coup grâce à ses implants…
Et ensuite…
Et ensuite…
Et ensuite je me réveille dans ma chambre. Ou plus exactement je suis réveillé par une agitation dans le couloir : quelqu’un est en train de courir. Par pur réflexe, je bondis et tire mon katana pour le braquer vers l’importun qui ouvre ma porte, mais c’est ce serviteur aux yeux bleus qui vient m’informer qu’une magistrate d’émeraude est arrivée au château.
Nous sommes au beau milieu de la nuit, voilà qui est surprenant. Mais on ne discute pas face à une émissaire impériale. Je m’habille donc au plus vite pour me rendre à la salle d’audience, en compagnie de Kagitsune, l’autre samurai de confiance du daimyo et vieux compagnon de bataille.
L’entrevue est courte : l’émissaire nous explique simplement qu’elle cherche à retourner à la cité impériale, mais que pour cela elle doit traverser les terres des Lions, et réclame donc une escorte. Une demande somme toute assez logique. Notre départ est prévu dès le lendemain, à l’aube.
Cela dit, aux bruits en provenance de la chambre voisine de la mienne, je connais au moins une émissaire et un samurai pour qui la nuit a été encore plus courte.
Le début du voyage se déroule sans incidents, jusqu’à midi où un affrontement avec un kappa vient apporter une distraction bienvenue. La vile créature s’en prenait à une vieille femme, ce qui en soit n’a aucune importance, mais la perspective d’affronter ce monstre était trop tentante. Mes efforts combinés à ceux de mes compagnons ont rapidement permis de s’en débarrasser.
Le voyage se poursuit jusqu’à un village voisin, auquel nous arrivons en fin d’après-midi. Un petit groupe de samurais du Lion discute devant l’auberge locale et nous observe d’un air hostile. Ayant autre chose à faire qu’un affrontement inutile, nous nous contentons de les saluer, mais les choses s’enveniment rapidement quand il devient évident que ces hommes ne sont absolument pas des samurais mais de vulgaires ronins de la pire espèce. Je mets pied à terre avec la ferme intention de leur donner une bonne leçon.
Kagitsune défi en duel celui qui à l’air d’être leur chef, pendant que je me charge des deux autres. Si personnellement je parviens à me débarrasser d’eux d’une seule passe d’armes qui aurait fait la fierté de mon maitre, mon camarade est en revanche gravement blessé avant de réussir à immobiliser son adversaire sans le tuer.
Nous entrons tous dans l’auberge pour le faire soigner, mais la magistrate exige de d’abord interroger notre prisonnier. A cette fin, j’ai la surprise de la voir user de méthodes des plus… répréhensibles. Aussi je préfère prendre l’initiative de menacer le prisonnier pour le faire parler. S’il n’est pas trop stupide, nous n’aurons pas besoin de recourir à cette déshonorante torture…
Toutefois, les choses évoluent de manière inattendue quand l’homme choisit de se suicider plutôt que de parler. La magistrate part donc soigner notre infortuné camarade, pendant que je me rends dans la salle principale.
C’est à ce moment que je ressens une très étrange impression. La vue de toutes ces lanternes dans ce bâtiment de bois me fait penser qu’il pourrait… brûler facilement… brûler… avec de belles flammes… le feu est si fascinant, si puissant et en constante évolution…
Un cri de rage m’arrache à mes pensées, et je découvre avec stupéfaction Kagitsune s’en prendre à la magistrate. Il la menace et parle de mots n’ayant aucun sens tels que ‘’holo-simulation’’ ou ‘’émèmohairpégé’’. De toute évidence, il a perdu l’esprit.
A moins que…
A moins que je ne me réveille d’un coup à bord d’un vaisseau spatial appartenant au Bakufu d’Hanzottori, avec un casque de réalité virtuelle sur le crâne.
Tout ça n’était qu’une simulation, comme l’explique le capitaine japonais qui voulait surtout récupérer le maximum d’informations sur nous et notre comportement. Garfield a l’air très troublé, Achab mécontent et moi déçu de ne pas avoir conservé de katana. Je me débrouillais plutôt bien avec, je trouve…
Les mercenaires nous laissent partir, et tout se serait bien terminé si le capitaine n’avait pas lancé à Achab un « au revoir, docteur » qui provoque un déclic dans mon esprit.
« Docteur ».
Docteur + exprime ses pensées à voix haute + n’aime pas la technologie métallique + comportement arrogant + date d’apparition = confirmation de mes soupçons depuis un moment = Mervot.
Sachant que Mervot = menace et que menace = défense violente et préventive… j’opte pour me jeter sur lui afin de l’étrangler.
D’ailleurs j’y arrive plutôt bien, jusqu’au moment où Garfield me donne un coup sur la tête qui me fait lâcher prise. Il a pas dû tout comprendre… Cela dit, Achab / Mervot (Acrot ?) en profite surtout pour (reprendre sa respiration et) exprimer sa satisfaction à avoir réussi à créer une sauvegarde organique de son propre esprit, comme un équivalent au système E.G.O.
Comme la sauvegarde date d’il y a trois semaines, c'est-à-dire juste avant notre casse sur l’Observatoire, il n’a pas l’air de comprendre pourquoi tout le monde veut sa peau (métaphoriquement parlant, vu qu’il n’en a pas encore). Pas grave, on va se faire un plaisir de lui expliquer.
Cependant, ces explications attendront un peu. Parce qu’une nouvelle surprise (encore une…) nous attend à notre retour à bord du Pèlerin. Une émission clandestine est en train de partir du vaisseau. Il s’agit plus exactement d’une vidéo. Et après quelques instants nous comprenons que cette vidéo est en fait… ce qu’est en train de voir Victor en ce moment même.